Comme
c’est le cas pratiquement à chaque année, nous avons encore eu une belle
tempête de neige à la mi-mars. Ce n’est sûrement qu’un simple fait divers pour
les oiseaux migrant à cette période de l’année et les cris enthousiastes des
corneilles pendant que nous pelletions ces tonnes de neige le lendemain en
était une belle preuve. Malgré cela, la quarantaine de centimètres de neige
tombés sur la région ont sûrement ralenti les oiseaux tant attendus. Et,
surtout, les vents violents qui ont soufflé du nord ont complètement rempli le
fleuve de glace! Ce ne sera sûrement pas facile de trouver des canards durant
la fin de semaine!!!
En
attendant que la température douce et les vents fassent disparaître les glaces,
nous avons encore dû nous réfugier en forêt. Cette fois, nous avons choisi les
forêts conifériennes de Saint-Onésime. Une fois rendus à notre destination, le
thermomètre n’indiquait qu’un frisquet ‑20°C, mais il était déjà remonté à ‑8°
au retour trois heures plus tard. Le soleil est toujours très ardent en mars et
les écarts de température entre le minimum et le maximum sont souvent très marqués.
À
Saint-Onésime, samedi le 18 mars,
seuls les oiseaux suivants se sont montrés entre 7 h 00 et
10 h 05 :
- 1 Pigeon biset
- 2 Pics mineurs
- 2 Pics chevelus
- 1 Grand Pic – Quelques arbres portaient des traces du travail de cet énorme pic!
- 5 Geais bleus
- 25 Corneilles d’Amérique
- 5 Grands Corbeaux
- 17 Mésanges à tête noire
- 13 Étourneaux sansonnets
- 9 Durbecs des sapins
- 1 Junco ardoisé – Il semble bien que ce vaillant petit junco a réussi à hiverner dans cet environnement pratiquement sans mangeoire!
Malheureusement
pour nous, les mésangeais, Mésanges à tête brune et Roitelets à couronne dorée
vus au même endroit il y a deux semaines ne se sont pas montrés. Dommage car
nous ne retournerons probablement pas à ce site avant l’été!
Dimanche
matin, nous avons décidé d’attaquer le fleuve… malgré la présence de glaces. Au
quai de Rivière-Ouelle, il n’y avait pratiquement aucune trace d’eau libre. Il
est rare que je souhaite un vent du sud-ouest, mais c’est bien ce qu’il
faudrait pour pousser vers le large cette barrière naturelle contre les
canards. En travaillant forts au télescope, nous avons tout de même réussi à
voir quelques goélands qui remontaient le fleuve, mais seulement cinq individus
ont pu être identifiés à l’espèce. Après plus d’une heure, nous avons plié
bagages (et trépieds) pour aller voir ailleurs. D’humeur morose, mais voulant
malgré tout continuer à profiter d’une si belle température, nous avons repris
presque à contre cœur la route vers Kamouraska.
C’est
finalement en parcourant le vaste territoire de Kamouraska que le sourire est
revenu sur nos visages. Au détour d’une route, en longeant une petite crête
rocheuse, nous avons repéré un gros oiseau blanc posé au sommet de la
falaise : le Faucon gerfaut! Stationnés juste sous l’oiseau, nous avons
admiré cette scène durant trente minutes. Depuis le mois de décembre, nous
sommes passés à cet endroit à plusieurs reprises et, à chaque fois, nous avons
ralenti en espérant que le gerfaut blanc ait eu la bonne idée de se percher sur
cet escarpement nettement plus photogénique qu’un silo à grain ou un piquet de
clôture! Eh bien, voilà, il y était!!!
Mais,
en l’admirant au télescope, nous nous sommes rapidement rendu compte que ce
gerfaut était nettement plus « beau » que celui que nous avions
photographié tout près le 29 décembre et le 4 février dernier. Le
premier oiseau avait la face nettement plus foncée et une ligne sombre mieux
définie traversait son œil. D’abord découvert le 27 décembre, ce gros
gerfaut blanc avait été vu et photographié par de nombreux observateurs ayant
fait le voyage spécialement pour lui; il a finalement été rapporté jusqu’au 10
février entre Saint-Denis-De La Bouteillerie et Kamouraska. Le deuxième
gerfaut blanc, celui qui a posé pour nous en ce magnifique dimanche ensoleillé,
était nettement plus blanc et se trouvait légèrement à l’extérieur du secteur
bien délimité que fréquentait le premier.
En
regardant les photos que j’ai prises de notre Faucon gerfaut quittant sa
falaise, nous avons eu une autre surprise : ses ailes étaient en pleine
mue!?! Au cours des 35 dernières années, j’ai eu la chance d’observer des
gerfauts à une cinquantaine de reprises entre le 19 octobre (2002) et le
18 avril (1995), mais je n’avais jamais remarqué d’individus en mue
auparavant. J’ai donc fait quelques recherches afin de trouver des détails sur
la période de mue de ce gros faucon, dont cet article qui résume bien les informations. Le Faucon gerfaut a dix rémiges primaires fonctionnelles (les
grandes plumes attachées à la « main » de l’oiseau), dix secondaires
(celles attachées à l’avant-bras) et trois tertiaires (celles attachées à son
bras). Alors que la vaste majorité des oiseaux remplacent leurs rémiges à partir
du poignet vers l’extérieur pour les primaires et vers l’intérieur pour les
secondaires, les faucons débutent la mue de leurs ailes par la quatrième
primaire et la cinquième secondaire! La mue se poursuit ensuite vers l’intérieur
et vers l’extérieur alternativement. Les espaces visibles dans les ailes de
notre oiseau indiquent donc qu’il débutait sa mue. Habituellement, les gerfauts
ne muent qu’une fois rendus sur leur territoire de nidification, soit à partir
de la fin d’avril. Qu’est-ce qui a bien pu provoquer une mue si hâtive chez cet
adulte??? Encore une fois, il y a plus de questions que de réponses…!
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Faucon
gerfaut (Gyrfalcon – Falco rusticolus)
Kamouraska – 19 mars
2017 © Claude Auchu |
Une
autre chose intéressante que j’ai apprise : les faucons femelles muent
avant les mâles. Pendant que la femelle couve et protège les fauconneaux
naissants, elle en profite pour muer. Le mâle, qui doit conserver toutes ses
capacités de vol pour nourrir sa famille, débute sa mue lorsque les jeunes sont
assez développés pour se protéger seuls. La femelle suspend alors sa propre mue
pour aller aider le mâle à ravitailler les oisillons. Intéressant, non?
Notre
promenade de dimanche le 19 mars
s’est étirée sur plus de six heures. Voici les oiseaux que nous avons
rencontrés entre La Pocatière et Kamouraska :
- 47 Pigeons bisets
- 7 Tourterelles tristes
- 4 Goélands argentés
- 1 Goéland marin
- 1 Épervier de Cooper – Un immature a encore été trouvé à Kamouraska.
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Épervier
de Cooper (Cooper’s Hawk – Accipiter
cooperii)
Kamouraska – 19 mars
2017 © Christiane Girard |
- 2 Harfangs des neiges – À La Pocatière, deux oiseaux regardaient passer les voitures le long de l’autoroute 20. Des migrateurs remontant lentement vers leur aire de nidification sont notés régulièrement le long du fleuve à la fin de mars.
- 2 Pics mineurs
- 1 Faucon gerfaut – Un bel adulte de forme blanche dans un environnement naturel à Kamouraska!
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Faucon
gerfaut (Gyrfalcon – Falco rusticolus)
Kamouraska – 19 mars
2017 © Claude Auchu |
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Il est bien plus beau que sur un silo!
Faucon
gerfaut (Gyrfalcon – Falco rusticolus)
Kamouraska – 19 mars
2017 © Claude Auchu |
- 4 Geais bleus
- 125 Corneilles d’Amérique
- 6 Grands Corbeaux
- 9 Alouettes hausse-col
- 8 Mésanges à tête noire
- 265 Étourneaux sansonnets
- 4 Moineaux domestiques
- 4 Chardonnerets jaunes
- 50 Plectrophanes des neiges – Curieusement, ces plectrophanes n’ont pas été vus dans les champs bordant le fleuve. Ils se trouvaient plutôt à Mont-Carmel, presque en pleine forêt!
- 2 Carouges à épaulettes
J’ai dû attendre lundi matin pour trouver enfin une nouvelle espèce pour l’année : en me rendant au travail, j’ai entendu un Bruant chanteur qui s’époumonait à annoncer son retour!