Oie rieuse, Fous de Bassan et Cormorans à aigrettes

Le mois de novembre s’est poursuivi comme il avait débuté : sous les nuages et les averses. Les oiseaux aquatiques ne sont évidemment pas incommodés autant que nous par ces conditions; c’est donc en fonction de ces oiseaux que nous avons planifié notre fin de semaine. Pour être honnête, il faut avouer que la marée montante et le vent faible du nord-est ont aussi fortement influencé notre décision!

Les nuages qui recouvrent la région depuis un mois ont tout de même un avantage. Agissant comme un isolant, les nuages aident la température à demeurer au-dessus du point de congélation même la nuit. Habituellement, avant même la première neige, une mince bande de glace se forme sur le rivage du fleuve à la limite de la marée haute. Cet automne, les rivages sont encore totalement libres de cette glace, ce qui aide sûrement les canards barbotteurs à prolonger leur séjour parmi nous.

Samedi, à Rivière-Ouelle, le décor paraissait moins gris que durant les dernières semaines. La première vraie neige de la saison était finalement tombée la veille, ce qui a contribué à augmenter légèrement la luminosité. Les précipitations ont continué à tomber durant toute notre excursion, mais en demeurant sous forme de neige. Nous avons donc pu parcourir le territoire en restant presque au sec. La visibilité au large passait régulièrement de bonne à moyenne selon la densité des précipitations.

Dimanche matin, c’était le retour de la pluie et la neige était déjà fondue en bordure du fleuve. Notre deuxième visite à Rivière-Ouelle en deux jours s’est déroulée sous une bruine souvent très dense (et dérangeante!) et l’excellente visibilité que nous avions à notre arrivée s’en est trouvée quelque peu réduite. Mais les canards de mer, les Eiders à duvet en particulier, ont grandement contribué au succès de nos excursions.

Les résultats de ces deux tournées à Rivière-Ouelle sont présentés dans la liste que suit. La randonnée de samedi le 26 novembre s’est déroulée de 6 h 55 à 12 h 55 et celle de dimanche le 27 novembre de 6 h 55 à 12 h 00.

• 1 / 0 Oie rieuse – L’adulte découvert il y a quelques jours était encore présent samedi, mais n’a pu être retrouvé dimanche. Son bec vaguement orangé indiquerait qu’il s’agit d’un oiseau de la sous-espèce groenlandaise qui hiverne normalement dans les îles britanniques. L’Oie rieuse n’est que rarement signalée dans la région; ce n’est d’ailleurs que la dixième mention connue. Si les oies et les bernaches qui migrent à travers la région avaient une aire protégée où se reposer, il est certain que le nombre d’observations des espèces plus rares augmenterait rapidement!

Oie rieuse (Greater White-fronted Goose – Anser albifrons) 

et Oie des neiges (Snow Geese – Chen caerulescens)

Rivière-Ouelle – 26 novembre 2016 © Claude Auchu

• 36 / 32 Oies des neiges
• 22 / 38 Bernaches du Canada
• 94 / 17 Canards noirs
• 1 / 2 Canards colverts
• 2 / 0 Canards souchets – Samedi, deux mâles s’entêtaient encore à résister aux éléments!
• 5 / 0 Fuligules milouinans
• 1700 / 3200 Eiders à duvet – La marée montante et le vent léger du nord-est de ces deux matinées offraient des conditions idéales aux eiders pour remonter le fleuve. Pourtant, les 1700 eiders vus samedi volaient vers le nord-est, soit dans le sens contraire de leur migration normale. Par contre, les 3200 observés dimanche se déplaçaient, eux, dans la bonne direction. Qu’est-ce qui a bien pu inciter les oiseaux de samedi à revenir sur leurs pas? La seule différence vraiment notable entre ces deux journées était qu’on ne distinguait pas la rive nord du fleuve samedi, même si la visibilité nous permettait de voir au moins jusqu’au milieu du fleuve (soit environ sept kilomètres). Est-ce qu’un minime manque de visibilité peut nuire à ce point à la migration des eiders???
• 4 / 16 Macreuses brunes
• 60 / 98 Macreuses à bec jaune – Ces totaux constituent d’excellentes quantités pour les Macreuses à bec jaune dans la région à la fin de novembre.
• 5 / 10 Hareldes kakawis
• 2 / 2 Garrots à œil d’or
• 2 / 0 Harles couronnés
• 17 / 17 Grands Harles
• 1 / 4 Harles huppés
• 11 / 19 Plongeons catmarins
• 4 / 0 Plongeons huards
• 1 / 0 Grèbe jougris
• 3 / 2 Fous de Bassan – Ces trois (ou cinq?) juvéniles étaient plutôt tardifs.
• 1 / 2 Cormorans à aigrettes – Comme pour les fous, cette espèce n’est que rarement notée aussi tardivement l’automne.
• 1 / 0 Buse pattue
• 0 / 1 Petit Pingouin
• 22 / 29 Guillemots à miroir – C’est toujours en novembre que ce petit alcidé atteint son pic d’abondance à Rivière-Ouelle.
• 15 / 20 Goélands à bec cerclé
• 3 / 20 Goélands argentés
• 32 / 24 Goélands arctiques
• 15 / 20 Goélands marins
• 18 / 28 Pigeons bisets
• 5 / 0 Tourterelles tristes
• 1 / 0 Pic mineur
• 4 / 4 Geais bleus
• 3 / 0 Corneilles d’Amérique
• 4 / 1 Grands Corbeaux
• 15 / 22 Mésanges à tête noire
• 0 / 1 Sittelle à poitrine blanche
• 12 / 40 Étourneaux sansonnets
• 2 / 0 Plectrophanes des neiges

Cette dernière fin de semaine de l’automne ornithologique s’est encore déroulée avec très peu de passereaux observés. Bien que nous nous soyons concentrés sur le fleuve, les fringillidés (durbecs, sizerins, roselins) sont souvent assez exubérants pour nous permettre de les repérer même en terrain ouvert. Nous savons déjà depuis plusieurs semaines que l’hiver 2016-17 sera pauvre en diversité aviaire. Notre défi sera donc de manquer le moins des quelques espèces encore présentes. 

Le fameux nordet

Une autre drôle de fin de semaine! Comme d’habitude, nous avions prévu des sorties dans divers habitats afin d’avoir une bonne idée des oiseaux encore présents dans la région. Cependant, les circonstances (lire « les conditions météorologiques ») ont tout modifié… mais pas nécessairement pour le pire. Vendredi, la météo annonçait une fin de semaine plutôt pluvieuse avec un température froide et de bons vents. À ce moment, pour samedi, les prévisions ressemblaient à « pluie surtout le matin avec vent du nord » et ce n’était pas beaucoup mieux dimanche avec « beaucoup de pluie, de vent et de froid ».

Par défaut, nous avions donc décidé d’affronter les conditions de samedi pour notre excursion à Rivière-Ouelle. Au réveil samedi matin, tout était sec à l’extérieur et un beau vent du nord-est soufflait! En déjeunant, un coup d’œil à MétéoMédia nous surprend : du soleil et un petit 20% de précipitation étaient à ce moment prévus pour dimanche!!! Que faire? Remettre à dimanche notre sortie à Rivière-Ouelle pour profiter des belles conditions annoncées? Nos manteaux d’hiver, tuques et mitaines étaient déjà sortis et attendaient tout près des téléscopes et de nos petits bancs… Notre hésitation n’a pas duré longtemps et nous sommes partis pour Rivière-Ouelle comme prévu. En sortant de la ville, un coup d’œil au fleuve nous a rassuré dans notre décision : les montagnes de Charlevoix étaient très bien découpées à l’horizon et le phare des Éboulements y brillait avec netteté, la visibilité semblait donc parfaite! On trouvera bien un autre endroit où aller dimanche…

Samedi le 1^er octobre, nous sommes donc demeurés à Rivière-Ouelle de 6 h 30 à 12 h 00, à profiter de conditions automnales idéales pour des birders. Parmi les 63 espèces observées, une belle variété d’anatidés circulait au large du quai et, même si les surprises escomptées ne se sont pas matérialisées, nous avons vécu une de nos plus belles matinées depuis longtemps. En voici les résultats:

• 1200 Oies des neiges            
• 195 Bernaches du Canada                 
• 116 Canards noirs                          
• 5 Canards colverts
• 4 Canards pilets  
• 17 Sarcelles d’hiver           
• 125 Fuligules milouinans – Une quantité surprenante pour la région.
• 2 Petits Fuligules                    
• 13 Eiders à duvet – Les eiders nous font encore attendre! Habituellement, à cette date, de bons groupes provenant de l’est viennent frôler le bout du quai. Espérons qu’ils ne passeront pas au milieu de la semaine…  
• 16 Macreuses à front blanc 
• 140 Macreuses brunes
• 10 Macreuses à bec jaune    
• 1 Harelde kakawi – Notre premier de l’automne.
• 3 Grands Harles                        
• 5 Harles huppés                                   
• 23 Plongeons catmarins                  
• 3 Plongeons huards                       
• 2 Grèbes esclavons                   
• 8 Grèbes jougris                       
• 1 Fou de Bassan                                   
• 570 Cormorans à aigrettes
• 19 Grands Hérons – Leur nombre a nettement diminué depuis une semaine (53 vs 19!).
• 7 Urubus à tête rouge – Le fumier épandu dans les champs ces derniers jours a visiblement attiré plusieurs urubus.
• 3 Busards Saint-Martin
• 2 Buses à queue rousse – Elle est un migrateur rare dans la région en automne. Les oiseaux de proie hésitent généralement à traverser les grands plans d’eau. Ceux qui descendent du nord sont bloqués par le Saint-Laurent et longent les côtes de Charlevoix vers le sud-ouest jusqu’à ce que le fleuve soit plus facile à franchir. Certaines espèces comme la Buse pattue et le Faucon pèlerin, moins intimidés par l’eau, sont bien présentes sur la rive sud du Saint-Laurent en automne.
• 1 Faucon émerillon                   
• 2 Faucons pèlerins                      
• 23 Pluviers argentés                     
• 3 Pluviers semipalmés – Un juvénile avait la patte droite difforme et tordue vers l’extérieur. L’oiseau réussissait malgré tout à s’en servir pour marcher de façon presque normale.

Pluvier semipalmé avec la patte droite difforme – Rivière-Ouelle – 1^er octobre 2011 © Claude Auchu 

• 3 Chevaliers grivelés                      
• 3 Grands Chevaliers                             
• 1 Bécasseau de Baird – Un juvénile tardif accompagnait le pluvier handicapé et deux Bécasseaux semipalmés. C’est une nouvelle date de présence tardive pour moi, battant mon ancien record par deux semaines!

Bécasseau de Baird – Rivière-Ouelle – 1^er octobre 2011 © Claude Auchu 

• 10 Bécasseaux variables                    
• 5 Petits Pingouins                  
• 1 Guillemot à miroir
• 200 Alouettes hausse-col     
• 1 Paruline obscure                      
• 1 Paruline à tête cendrée   
• 13 Parulines à croupion jaune  
• 1 Paruline masquée                    
• 29 Bruants à gorge blanche           
• 10 Bruants à couronne blanche          
• 9 Juncos ardoisés                                 
• 115 Tarins des pins

Au retour à la maison, en pensant à la belle matinée que nous venions de passer et à la température rêvée annoncée pour dimanche, nous avons pris la décision de retourner à Rivière-Ouelle, quitte à manquer certaines espèces de passereaux durant la fin de semaine. Surtout que le vent pour dimanche devait encore souffler du nord-est et, cette fois, à plus de 25 km/h!

En soirée, samedi, la pluie (non-prévue) a commencé à tomber et s’est pousuivie durant pratiquement toute la nuit! Dimanche, au lever à 5 h 30, il tombait une petite bruine et le temps semblait plutôt brumeux! Ça regardait mal, c’est le cas de le dire!!! Mais, au diable la météo, nous quittons avec enthousiasme pour Rivière-Ouelle. Cette fois, en sortant de la ville, les montagnes de Charlevoix étaient cachées par le brouillard et les essuie-glaces de l’auto fonctionnaient. Heureusement, le vent du nord-est était assez puissant pour pousser la bruine pratiquement à l’horizontale et, en nous camouflant près du quai, nous avons réussi à rester (presque) au sec. À notre arrivée, la visibilité était médiocre, mais les vents obligeaient les nombreux oiseaux présents à se déplacer près du rivage et nous avons connu une matinée très occupée.

Ainsi, dimanche le 2 octobre entre 6 h 20 et 12 h 00, nous sommes demeurés presque continuellement l’œil collé à l’oculaire, cachés tout près du quai (sauf pour une petite visite rapide de 15 minutes à Saint-Denis afin de confirmer que les limicoles étaient ailleurs). Bien sûr, le feuillet d’observations quotidiennes rempli après l’excursion ne compte presqu’aucun passereau, mais les oiseaux aquatiques ont très bien remplis notre avant-midi. Au retour de Saint-Denis, vers 9 h 30, les côtes de Charlevoix sont même apparues à l’horizon, nous permettant de voir que des espèces très intéressantes circulaient également au large!

Voici un résumé de ce que nous avons vu durant l’avant-midi, presqu’exclusivement au large du quai:

• 1 Oie rieuse – En revenant de Saint-Denis, un adulte est trouvé dans un champ parmi un tout petit groupe de 24 Bernaches du Canada! Confirmer la sous-espèce n’est pas vraiment facile (même avec les photos) mais, en étant prudents, disons que le bec vaguement orangé, les marques du ventre plutôt nombreuses et la tête relativement sombre indiqueraient qu'il s'agissait possiblement de la sous-espèce groenlandaise. C’est ma première mention automnale dans la région!

Oie rieuse et Bernaches du Canada – Rivière-Ouelle – 2 octobre 2011 © Claude Auchu 

• 325 Oies des neiges
• 155 Bernaches du Canada
• 75 Canards noirs
• 1 Canard colvert
• 12 Canards pilets
• 3 Sarcelles d’hiver
• 4 Fuligules à collier
• 70 Fuligules milouinans
• 5 Petits Fuligules
• 13 Eiders à duvet
• 162 Macreuses à front blanc – Les macreuses se déplaçaient souvent en groupes mixtes contenant les trois espèces.
• 316 Macreuses brunes
• 257 Macreuses à bec jaune
• 11 Garrots à œil d’or
• 2 Harles couronnés
• 81 Harles huppés
• 62 Plongeons catmarins
• 30 Plongeons huards
• 1 Grèbe esclavon
• 2 Grèbes jougris
• 2 Fous de Bassan
• 545 Cormorans à aigrettes
• 5 Pluviers argentés
• 1 Pluvier bronzé
• 33 Bécasseaux à croupion blanc
• 21 Bécasseaux variables
• 16 Petits Pingouins
• 5 Macareux moines – Pas moins de cinq individus volant vers l’est ont été repérés au large du quai au milieu de l'avant-midi, durant une période de visibilité relativement bonne!!! Le premier fut rapidement suivi après quelques secondes par deux autres oiseaux et encore deux autres sont vus une trentaine de minutes plus tard. Deux autres oiseaux appartenant probablement à cette espèce mais volant un peu trop loin n'ont pas été considérés... C’est la quatrième année de suite que nous voyons cette espèce à Rivière-Ouelle!

Ce fut donc une autre matinée magnifique, remplie d’émotions et d’oiseaux. En relaxant chez nous durant la soirée, nous nous sommes rendus compte d’une chose importante : même si nous avons chacun plus de 35 ans de birding à notre actif, nous avons encore le goût d’endurer les conditions atmosphériques adverses afin de pouvoir savourer nos oiseaux. Et, le pire, c’est que nous sommes heureux de le faire!